« Baldur’s Gate III » se hisse en nouveau maître du jeu de rôle


Après vingt-deux ans d’attente, la célèbre série « Baldur’s Gate » se voit dotée d’un troisième épisode.

Pour des raisons techniques, le jeu vidéo de rôle ne peut qu’espérer approcher l’expérience de son auguste aîné, le jeu de rôle sur table, qui se pratique avec des partenaires et un maître du jeu, et qui peut parfois s’apparenter à du théâtre d’improvisation. Outre-Quiévrain, Larian Studios, connu pour ses deux Divinity : Original Sin, s’est attelé en 2017 à la suite de la prestigieuse série canadienne Baldur’s Gate, dont les deux épisodes principaux datent de 1998 et 2000.

La licence demeure adulée pour avoir transposé avec succès les règles et l’univers médiéval fantastique de Donjon & Dragons, référence incontestée du jeu de rôle sur table. Après une phase d’accès anticipé concluante (trois années durant lesquelles les plus impatients pouvaient financer le développement en s’essayant à une version préliminaire du titre) et un enthousiasme grandissant, Baldur’s Gate III débarque dans sa version finale cet été (disponible sur PC depuis le 3 août et sur PS5 à partir du 6 septembre). Indubitablement, l’écart entre les deux mondes, celui du papier et de l’écran, n’a jamais été aussi réduit.

Une véritable course contre le monstre

Le protagoniste – personnalisable de pied en cap, de sa race à sa classe, de son passé au timbre de sa voix – se retrouve embarqué dans une galère sous forme de grande fuite en avant. Dans sa tête et dans celle des compagnons qu’il rencontre au fil de l’aventure a été implanté un parasite qui menace de les transformer en monstruosités tentaculaires à tout moment. Le groupe cherche donc d’urgence le soigneur providentiel capable d’effectuer l’ablation salvatrice. La compagnie se rend vite compte que le salut se trouve vraisemblablement dans la ville de Baldur’s Gate, horizon permanent de cette épopée et centre névralgique des enjeux politiques qui se dessinent en toile de fond.

Tout le monde a ses petits soucis dans Baldur’s Gate III. Astarion, le rejeton de vampire, espère s’émanciper de son maître. Karlach, adorable force de la nature aux airs démoniaques, aimerait réparer son cœur mécanique qui surchauffe. Tout le monde, sauf vous, le joueur. Vous, vous faites exactement ce que vous voulez. Et c’est dans cette liberté déraisonnable que réside la magie du titre. En théorie, il est possible d’user de n’importe quelle stratégie pour résoudre un problème : de violence, de ruse ou de diplomatie.

Comme dans Donjons & Dragons, les jets de dés sont légion : il faut ainsi régulièrement lancer un dé virtuel à vingt faces, qui roule devant vos yeux angoissés, décidant, en fonction de votre score, de la réussite ou non de votre action. Ainsi vous saurez si le bagout de votre avatar se révèle suffisant pour glisser un bobard convaincant ou si son intimidation peut faire lâcher les armes des belligérants avant même d’avoir à sortir les siennes. L’ampleur des perspectives donne littéralement le tournis et relève du tour de force.

Les jets de dés sont au centre du système de jeu de « Baldur’s Gate III ». La réussite ou l’échec de ces tests peuvent changer drastiquement la nature des réactions que vous obtiendrez.

Le plaisir de l’expérimentation se révèle d’autant plus intense que le moindre personnage, des combattants qui nous accompagnent aux marchands les plus obscurs, bénéficie d’animations charmantes et d’un doublage particulièrement réussi. Certains peuvent agir de manière théâtrale et grandiloquente, c’est vrai, mais d’autres, comme la plupart des gobelins, sont affublés d’un accent cockney des plus fleuris.

Un délire d’initiés

Avec sa versatilité narrative, sa maîtrise artistique et ses dizaines, voire ses centaines d’heures de jeu pour les plus passionnés, que peut-on alors reprocher à ce béhémoth de Baldur’s Gate III ? Des combats peut-être trop longs, jamais simples à aborder. Pour sûr, ils sauront faire plaisir aux aficionados de tactique, nourris aux guides stratégiques. Cependant, leur complexité et le manque criant de pédagogie du jeu feront fuir ceux qui ne peuvent pas se permettre un tel investissement en temps et en énergie. Ceux-là pourront néanmoins se réfugier dans le salvateur mode facile qui propose des batailles plus légères.

Le jeu vous indique à l’avance si une ligne de dialogue passera par la cruelle loi du lancer de dé.

Cette difficulté à enseigner les ficelles d’un système, celui de Donjons & Dragons, se retrouve par ailleurs à de très nombreux étages. Les menus sont bien trop souvent remplis de textes explicatifs à rallonge. Ces annotations sont régulièrement rédigées dans un sabir bien délicat à appréhender pour le néophyte. Quant aux choix proposés pour faire progresser les aptitudes de son personnage, ils se révèlent si abondants et variés qu’ils en deviennent intimidants.

Impossible néanmoins d’en vouloir à Larian qui fournit déjà de nombreux efforts pour accommoder des règles, celle du jeu de rôle de base, qui ont évolué sans se soucier du jeu vidéo pendant un demi-siècle. Et si la question du bien-fondé de l’adaptation d’un tel monument peut toujours se poser, le studio belge n’est pas loin d’avoir réalisé tout le potentiel de cette tâche herculéenne qui lui a été confiée.

Les affrontements peuvent aller du simple duel à la bataille rangée avec des dizaines d’adversaires à l’écran.

L’avis de Pixels

On a aimé :

  • la quantité invraisemblable d’embranchements, de possibilités, de personnalisation de l’épopée ;
  • la réalisation impressionnante ;
  • les doubleurs en VO qui donnent tout et qui ne peuvent pas laisser indifférent (mention spéciale à la narratrice) ;
  • le sous-titrage en français sans bavure.

On n’a pas aimé :

  • les combats peuvent sembler interminables et cruels pour le non-initié ;
  • l’ergonomie pataude, qui a du mal à exploiter efficacement les concepts du jeu.

C’est plutôt pour vous si :

  • vous êtes enchanté par le parfait retour en grâce de la licence Donjons & Dragons.

Ce n’est plutôt pas pour vous si :

  • vous avez d’autres titres sur le feu : il s’agit là d’un jeu à temps plein.

La note de Pixels

[Test de persuasion facile] : 16. Auquel on ajoute un bonus de +1, ce qui fait donc 17/20



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